A PERTE DE VUE / Un copilote aveugle : du jamais vu sur le Dakar !
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 :: Est Républicain supplément Est Magazine n°235 – Dimanche 12 oct. 2003

 

 

 

 

Du jamais vu

sur le Paris-Dakar

 

Aveugle, le Nantais Michel Point sera copilote lors du prochain rallye africain. Une expérience unique et incroyable

 

Beaucoup d'obstacles à surmonter.

Michel Point a fêté ses 53 ans dans le désert. C'était le 16 juin dernier au Maroc, pour une reconnaissance. Entre caillasse et dunes de sable, un décor qu'il retrouvera l'an prochain, du 1er au 18 janvier sur le Paris-Dakar. Comme beaucoup, voilà plusieurs années qu'il porte le projet. Lui a pourtant dû surmonter un obstacle supplémentaire. Il ne voit pas. Pas question de masquer la réalité. Il explique : « Ne dîtes pas non-voyant, c'est une façon de croire que tout est réglé. Que vous soyez aveugle ou non-voyant, vous rencontrez les mêmes problèmes. Cela ne sert à rien de se voiler la face ». Alors, l'équipe qu'il formera avec Nicolas Richard, un pilote qui s'est déjà frotté à deux reprises au sable de l'aventure africaine, s'est choisie une formule choc en guise de slogan : « Un copilote aveugle, du jamais vu sur le Dakar ».

 

Un pari unique qui en laisse plus d'un pantois. Formateur dans un institut spécialisé des environs de Nantes (Vertou), Michel Point précise d'entrée : « Avant tout, on est dans le cadre d'une aventure personnelle. Il ne s'agit pas de montrer que tous les aveugles ont envie ou peuvent faire le Dakar. Il ne faut pas nier le handicap. Cela demande des efforts ». Beaucoup de réflexion, d'obstination. Résoudre les questions techniques, s'affranchir des contraintes administratives.

 

 A quoi sert un copilote aveugle ?

 

Un copilote ayant besoin d'une licence de compétition automobile, il a fallu multiplier les pressions, batailler ferme, se rendre jusqu'en Côte d'Ivoire pour obtenir le fameux sésame. Du coup, dans les starting-blocks depuis 1996, le projet a pris du retard. Mais aujourd'hui, il est sur ses quatre roues. Avec un budget conséquent, plus de 150.000 euros, qui permettra même d'emmener un 4x4 Toyota Land Cruiser HDJ 80 et une voiture d'assistance.

Michel Point : "Cela nous demande plus de préparation qu'aux autres".

Nicolas Richard, pilote, et Michel Point, copilote, en reconnaissance dans les dunes de Merzouga (Maroc).

A l'origine de la démarche, Nicolas Richard (33 ans) souhaitait relever, comme il le dit, « un beau challenge ». Il a donc recherché un copilote aveugle et a découvert Michel Point. Gaillard, qui s'est essayé au saut à l'élastique, a connu l'épreuve des longues marches Audax à côté desquelles le marathon de New York a des allures de promenade à Central Park... « J'aime les sensations », confie l'intéressé, « mais je ne suis pas un casse-cou. On part avec un maximum de sécurité. On ne fait pas le Dakar pour le gagner ». Juste parce qu'il s'agit d'un défi intéressant.

Reste la question numéro un. A quoi sert un copilote qui ne voit pas ? Qui ne peut pas vous indiquer au dernier moment qu'il faut prendre le petit chemin à droite, éviter un piège ? « On en a discuté avec beaucoup de spécialistes », poursuit Michel Point. « Le Paris-Dakar, ce n'est pas un rallye traditionnel où il faut intervenir à chaque virage. Jean-Louis Schlesser nous a même dit : "Je ne demande pas à mon copilote de regarder la piste". Certains conducteurs ne supportent d'ailleurs pas que le passager surveille leur conduite. Là, je serai sur le trip (NDLR : qui calcule les distances) et dirai, par exemple : "On est au kilomètre 100. Au km 102,3, il y a un puits, il faut prendre à droite". Ce qui se passe sur la piste, c'est l'affaire du conducteur. Il regarde ce qui est près, le copilote regarde au loin ». Chacun devenant tour à tour le regard de l'autre. Deux hommes unis comme les deux yeux d'une seule et même voiture.

 

Contact : Association "A perte de vue", 4, rue Saint-André, 85620 Rocheservière.

Tél. 06.89.91.63.02 ou 06.15.21.27.04.

E-mail : michel.point@wanadoo.fr

 

 

La route au bout des doigts

 

Un terminal en braille

 

Un copilote travaille avec trois outils : le road-book, qui donne les directions et les obstacles de la piste à suivre ; le Terratrip, qui calcule les distances, et le système GPS. Michel Point disposera ainsi de toutes les informations nécessaires grâce à un terminal informatique braille et vocal, nommé Elba. GPS et Terratrip seront connectés directement à Elba par les ports de communication alors que le road-book sera inscrit sur une mémoire-flash. Ce qui a obligé les organisateurs à mettre au point une version informatique de road-book qui sera donnée à l'équipe chaque mation. Afin d'éviter que l'ordinateur soit congestionné par la poussière, un filet d'air passera en permanence sur l'afficheur.

 

 

Penser à tout

 

Quand la voiture secouera, pas évident de garder les mains sur le clavier. Et, dans cet habitacle réduit à sa plus simple expression, il y a un bruit d'enfer. Alors, comment rester en contact avec les informations ? Le clavier sera solidement arrimé juste devant le copilote. Niveau sonore, il y a évidemment le casque. « On essaie de penser à tout », souligne Michel Point, « cela nous demande plus de préparation qu'aux autres ». Le Nantais sera équipé d'une télécommande qui lui permettra de faire klaxonner le véhicule… Au cas où il s'égarerait.

 

 

Attention aux chocs

 

Michel Point ne pourra pas anticiper les chocs. Encore plus que les autres copilotes, il pourrait donc être victime du coup du lapin. En collaboration avec un ergonome et un médecin, un système a été mis au point. Le casque sera relié au siège grâce à un caoutchouc qui amortira les heurts. Le repose-pied sera équipé de deux arceaux, comme sur les planches à voile.

 

 

 

L'avis des spécialistes

 

Stéphane Peterhansel :« Le pilote devra l'aider »

 

« C'est une idée originale. Cela me surprend dans la mesure où le travail du copilote est important. On ne peut pas imaginer qu'il soit aussi performant. Quand on passe d'une note à l'autre, il faut visualiser ou détecter quelque chose de la note précédente. Là, cela ne sera pas possible. D'habitude, la communication ne va que dans un sens. Ici, le pilote devra l'aider. J'ai un peu peur que, au niveau des impacts et des chocs, il subisse beaucoup. Il ne pourra pas anticiper ».

 

Stéphane Peterhansel a remporté six fois le Paris-Dakar en moto et s'est placé 2e l'an passé en auto.

 

Stéphane PETERHANSEL

Patrick ZANIROLI

 

Patrick Zaniroli : « Seulement une expérience »

 

« Au départ, cela peut prêter à sourire. Mais, on se trouve là sur un rallye où l'on n'annonce pas tous les 50 m : "Virage à droite", "Virage à gauche"... Seul le Dakar peut permettre ce type d'expérience. Mais cela doit rester une expérience. Sur le Dakar, il y a une catégorie handicapé. Des gens tétraplégiques ou amputés ont déjà concouru. Michel Point prendra moins de risques qu'eux. Et puis, on le connaît depuis cinq ou six ans. Il est déterminé, sérieux. Je suis sûr qu'il sera devant des personnes qui ont deux yeux ».

 

Patrick Zaniroli est directeur sportif du Paris-Dakar.

 

Jean-Louis Schlesser : « Pas une partie de plaisir »

 

« Il ne pourra pas être au niveau des premiers. Mais, comme il aura tout visualisé à l'intérieur, il aura une approche supérieure à celle de trois quarts des autres copilotes. J'ai rencontré Michel Point. C'est quelqu'un de sérieux. Mais beaucoup de choses ne dépendront pas de lui. Un copilote subit beaucoup de chocs, lui ne les verra pas arriver. Il faudra que le pilote l'aide, roule sans prendre de risques. Cela ne sera pas une partie de plaisir ».

 

Jean-Louis Schlesser a gagné deux Paris-Dakar (1999 et 2000).

 

Jean-Louis SCHLESSER

Gilles PICARD

 

Gilles Picard : « Trouver le rythme »

 

« Un copilote aveugle ? Cela me surprend mais c'est génial. Sur le Dakar, tout est possible. C'est ce qui fait la grandeur de l'épreuve. Mais il faut adapter le matériel et sa vitesse. Ils ne pourront pas être au niveau des premiers. Dans les véhicules de tête, il y a un autre travail en dehors des notes. C'est le suivi technique de la voiture. Là, le pilote devra trouver le bon rythme. Le Dakar, c'est une machine qui avance tout le temps. Vous ne pouvez pas vous mettre trop en retard et arriver à la nuit à chaque bivouac sinon vous ne dormez plus, vous êtes trop fatigués  ».

 

Gilles Picard a courru 19 Paris-Dakar, 11 comme copilote (2e l'an passé).

 

Textes Philippe MARACCI

Photos Roger CLAUDIN, Raphaël GAILLARDE /

GAMMA, PQR BEP / F CHAVAROCHE /

NICE MATIN et ER

 

 

   
 

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